Alexandre Ganoczy

Alexandre Ganoczy 1928: théologien écrivain catholique hongrois, il a particulièrement porté son attention sur les études de la Réforme. Promoteur éminent du dialogue catholique-protestant, il a également favorisé les échanges entre la théologie et les sciences naturelles. Son œuvre a eu une influence significative dans les régions germanophones et francophones.

Biographie : Né à Budapest, il est le fils d’Amália Krenner (1898–1974), d'abord luthérienne puis catholique, et de Sándor Gánóczy (1900–1977), ingénieur chimiste catholique. De 1947 à 1949, il étudie au séminaire de la Faculté de Théologie de l’Université Pázmány Péter. En 1949, il commence sa mission en France, poursuivant ses études au séminaire de l'Archidiocèse de Paris. Il est ordonné prêtre en 1953 et obtient sa licence en 1957. De 1959 à 1961, il est vicaire à Arcueil. Pendant les dix années suivantes, il est aumônier pour les ouvriers et les émigrés hongrois à Paris, ainsi qu’aumônier universitaire.

Études et Contributions: Entre 1961 et 1963, il obtient son doctorat en théologie à l’Université Pontificale Grégorienne à Rome, avec une thèse sur la doctrine de Calvin concernant l'Église et le ministère, suggérée par les théologiens de la communauté œcuménique de Taizé. Cette thèse, intitulée "Calvin, théologien de l’Église et du Ministère", est intégrée en 1964 dans la série "Unam Sanctam" par le théologien Yves Congar (1904–1995) pour être utilisée lors du dialogue avec les réformés pendant le Concile Vatican II. Dès 1963, il participe en tant que conseiller à la préparation de textes pour le Concile, collaborant notamment avec le théologien Hans Küng (1928–2021) et servant les évêques de l'est de la France. L’esprit œcuménique et ouvert du Concile marque durablement son travail. Il considère Congar comme son maître, qui a influencé son parcours.

Recherche et Enseignement : De 1963 à 1965, grâce à Congar, il est chercheur boursier à l’Institut für Europäische Geschichte, où il produit "Le jeune Calvin. Genèse et évolution de sa vocation réformatrice" (1966). En 1965, il obtient la citoyenneté française. Il enseigne ensuite à Tübingen, Münster, Wurtzbourg et Paris, et devient chercheur au Centre National de la Recherche Scientifique. À Tübingen, il travaille à l’Institut für Ökumenische Forschung en tant qu’assistant de Küng. En 1967, il obtient l’habilitation en dogmatique et théologie œcuménique à l’Université de Münster. En 1968, il est nommé conseiller scientifique au Secrétariat pour l’Unité des Chrétiens au Vatican, où il rencontre Joseph Ratzinger (1927–2022, futur pape Benoît XVI). En 1969, il obtient un doctorat en philosophie à la Sorbonne avec une thèse sur les sources philosophiques de la pensée de Calvin, sous la direction de l’historien Richard Stauffer (1921–1984).

Positions et Influence : De 1972 à 1996, il dirige l’une des chaires de dogmatique de la Faculté de Théologie de l’Université de Wurtzbourg et l’Institut Hermann Scholl pour les études calvinistes. À Wurtzbourg, il noue une amitié durable avec le théologien luthérien Wolfhart Pannenberg (1928–2014) et collabore étroitement avec l’exégète Rudolf Schnackenburg (1914–2002). Il participe également au groupe de travail luthéro-catholique dirigé par Pannenberg et Karl Lehmann (1936–2018), élaborant des documents sur des doctrines divisant les confessions chrétiennes, telles que la justification, l’eucharistie et le ministère ecclésial. De 1974 à 1983, il dirige un projet sur l'herméneutique de Calvin financé par la Deutsche Forschungsgemeinschaft. De 1978 à 1980, il travaille au département d’histoire religieuse occidentale de l’Institut für Europäische Geschichte à Mayence. En 1982, il est nommé docteur honoris causa de l’Université de Genève et, en 1990, de l’Université réformée Károli Gáspár de Budapest. Depuis 1996, il est professeur émérite et s’installe dans le sud de la France. En 1997, il occupe brièvement la chaire fondée par l’évêque Klaus Hemmerle (1929–1994) à l’École technique d’Aix-la-Chapelle. En 2009, il reçoit le prix Stephanus de la Société Saint-Étienne, et en 2013, il est élu membre externe de l’Académie hongroise des sciences. Depuis 2018, il est également docteur honoris causa de l’Université Babeș-Bolyai de Cluj-Napoca. Il écrit en français, allemand et hongrois, a publié plus de trente livres, traduits en plusieurs langues, dont l’italien, l’espagnol et l’anglais.

Théologie et Contributions : Il a développé sa théologie de l'amour comme principe théologique basée sur les enseignements du Nouveau Testament ("Liebe als Prinzip der Theologie", 1994). Ses écrits en dogmatique traitent des doctrines de Dieu, de la Trinité, de la création, de l'Église et des sacrements, ainsi que des questions épistémologiques et scientifiques en théologie. Inspiré par la méthode de corrélation du théologien luthérien Paul Tillich (1886–1965), il qualifie sa dogmatique de système ouvert ou "répondant", basé sur une dynamique de questions-réponses. Il fait souvent référence à Karl Rahner, qui affirmait que "tout dogme défini est objectivement ouvert vers l'avant". Ganoczy estime que "nous n'avons pas encore atteint la meilleure, la plus correcte, la plus vraie interprétation". Il applique cette idée aussi bien aux sciences naturelles qu'à la théologie, qu'il considère comme devant progresser pour maintenir son caractère scientifique. Il prône une théologie non autoritaire qui permet le questionnement, où les théologiens accueillent diverses interprétations des doctrines de foi sans craindre que cela ébranle la foi des croyants.

Ganoczy utilise fréquemment l'expression "foi confiante", pour désigner la confiance en Dieu inhérente à la foi chrétienne, tout en rejetant la méfiance et la crédulité. La foi, dans le sens du Nouveau Testament, englobe également l'espoir et le dévouement existentiel, où le croyant suit le Christ de tout son être, même face à la mort, un thème qu'il explore plus en détail dans "Vivre notre mort en chrétien" (2016). Il s'oppose à la justification théologique de l'euthanasie et soutient la possibilité de conversion après la mort, même pour ceux qui ont commis des péchés mortels, voyant la mort comme "l'entrée dans une éternité riche en nouvelles possibilités".

Dialogue entre Science et Foi : Depuis son ouvrage "Suche nach Gott auf den Wegen der Natur" (1992), Ganoczy s’intéresse aux questions communes entre les sciences naturelles et la foi chrétienne, explorant la possibilité d'une théologie de la nature et dialoguant avec des scientifiques comme Jean-Pierre Changeux (1936–) et Vilmos Csányi (1935–). Il critique le créationnisme et la thèse de la "conception intelligente", les jugeant théologiquement et scientifiquement infondées. Ses recherches abordent également des sujets tels que la relativité, la théorie quantique et le chaos.

Actuellement, Alexandre Ganoczy vit à Paris 75012, où il organise des conférences théologiques à caractère spirituel et confessionnel pour les fidèles de la paroisse locale. Il prépare son dernier livre, “Du Dieu Unique au Dieu Amour”, sur l'évolution de l'image de Dieu dans la Bible  et un essai sur la longévité et la vie éternelle. Il est président honoraire de la Fondation Breznay Ganoczy.